Introduction
« Anouilh a une incontestable habileté de dramaturge et atteint parfois la puissance : son registre ne manque pas d’ampleur, puisqu’il va du romantisme de l’Hermine , sa première pièce , au réalisme inquiétant du Voyageur sans bagage et au réalisme mythique d’Antigone; du pessimisme moral des Pièces Noires à la fantaisie des Pièces roses, dont se détache le charmant Bal des voleurs ». Gaëtan Picon, Panorama de la Nouvelle Littérature, Gallimard 1960
Jean Anouilh a toujours fait preuve d’une grande discrétion concernant sa propre histoire : Ma vie privée est mon affaire personnelle a-t-il d’ailleurs confié lors d’une interview en 1964.
Il est né à Bordeaux en 1910, d’un père tailleur et d’une mère musicienne. Il arrive à Paris en 1921 et poursuit ses études au collège Chaptal. Après des études de droit, il débute dans la publicité où il rencontrera Prévert. Très tôt passionné par le théâtre, Jean Anouilh assiste émerveillé, au printemps 1928, à la représentation de Siegfried de Jean Giraudoux . Cette pièce servira de révélateur : « c’est le soir de Siegfried que j’ai compris… »
En 1929 il devient le secrétaire de Louis Jouvet . Les relations entre les deux hommes sont tendues. Qu’importe, son choix est fait, il vivra pour et par le théâtre.
Sa première pièce, l’Hermine (1932), lui offre un succès d’estime, et il faut attendre 1937 pour qu’il connaisse son premier grand succès avec le Voyageur sans bagages . L’année suivante le succès de sa pièce la Sauvage confirme sa notoriété et met fin à ses difficultés matérielles. Au travers de textes apparemment ingénus, Anouilh développe « une vision profondément pessimiste de l’existence ».
Puis éclate la seconde guerre mondiale. Pendant l’occupation, Jean Anouilh continue d’écrire. Il ne prend position ni pour la collaboration, ni pour la résistance. Ce non-engagement lui sera reproché.
il se lance dans l’adaptation de tragédies grecques et obtient un nouveau succès avec Eurydice (1942). En 1944 est créé Antigone (1944). Cette pièce connaît un immense succès public mais engendre une polémique. Certains reprochent à Anouilh de défendre l’ordre établi en faisant la part belle à Créon . Ses défenseurs mettent au contraire en avant les qualités de l’Héroïne.
À la Libération, Anouilh continue d’écrire en alternant pièces « noires », « roses », « brillantes », « grinçantes », « costumées », « secrètes » et « farceuses », suivant leur degré de pessimisme, de férocité et d’hypocrisie.
Il obtient de nombreux succès. Citons notamment L’Invitation au château (1947), L’Alouette (1952), Pauvre Bitos ou le dîner de têtes (1956), Beckett ou l’honneur de Dieu (1959).
En 1961, il connaît un échec avec La Grotte . Il se tourne alors vers la mise en scène. Anouilh est un des premiers à saluer le talent de Samuel Beckett, lors de la création d’En attendant Godot. Il soutiendra également Ionesco, Dubillard, Vitrac…
Il écrira encore plusieurs pièces dans les années soixante-dix, dont certaines lui vaudront le qualificatif « d’auteur de théâtre de distraction » . Anouilh assume alors parfaitement ce rôle revendiquant volontiers le qualificatif de « vieux boulevardier ». Et allant même jusqu’à se présenter comme un simple « fabricant de pièces » .
Il n’en reste pas moins qu’Anouilh a bâti une œuvre qui sous l’apparence d’un scepticisme amusé révèle un pessimisme profond. Il a également su dépeindre ces combats passionnés où l’idéalisme et la pureté se fracassent contre le réalisme et la compromission. Comme l’écrit Kléber Haedens, » Anouilh touche par ses appels au rêve, sa nostalgie d’un monde pur et perdu ».
Anouilh est mort en 1987.
Chloé Sanseverina
Source bibliographique
Véronique Taquin, Antigone (Hachette)
Charles Delattre, Antigone (Bréal Editions)
Kléber Haedens Une Histoire de la Littérature française, Grasset 1970
Biographie
1910 | Naissance à Bordeaux de Jean Anouilh. Son père est tailleur et sa mère musicienne (dans un orchestre se produisant sur des scènes de casino en province) et professeur de piano.C’est dans les coulisses de ces casinos, notamment celui d’Arcachon que Jean Anouilh découvre les grands auteurs classiques : Molière , Marivaux et Musset. |
1921 | Jean Anouilh vit à Paris et rentre au collège Chaptal. C’est très tôt qu’il se prend de passion pour le théâtre . |
1928 | Il est le condisciple de Jean-Louis Barrault et lit Claudel, Pirandello, et Shaw. Il assiste émerveillé, au printemps, à la représentation de Siegfried de Jean Giraudoux : c’est le soir de Siegfried que j’ai compris. Je devais entrer par la suite dans une longue nuit , dont je ne suis pas encore sorti , dont je ne sortirai peut-être jamais, mais c’est à cause de ces soirs du printemps 1928, où je pleurais , seul spectateur, même aux mots drôles , que j’ai pu m’évader un peu. » |
1929 | Jean Anouilh travaille pendant deux ans dans une agence de publicité. Il y rencontre Jacques Prévert. |
1930 | Jean Anouilh devient le secrétaire particulier de Louis Jouvet. Les relations entre les deux hommes sont tendues. Louis Jouvet se reprochera par la suite de ne pas avoir pressenti la passion pour le théâtre qui habitait Jean Anouilh. Les deux hommes se séparent. |
1932 | Premier succès d’estime à 22 ans de Jean Anouilh avec L’Hermine créé au théâtre de l’Œuvre . Les critiques sont bonnes. Jean Anouilh épouse la comédienne Monelle Valentin. |
1933 | Mandarine. La pièce est un échec |
1935 | Y avait un prisonnier La pièce est un échec |
1937 | C’est cette année là que, grâce au metteur en scène, Georges Pitoëff, qui crée le Voyageur sans bagage que Jean Anouilh connaît son premier succès. Succès qui lui apporte la notoriété et qui met fin à ses difficultés matérielles. La pièce sera jouée 190 fois. |
1938 | Georges Pitoëff crée la Sauvage (plus de 100 représentations). André Barsacq crée Le Bal des Voleurs . La pièce connaît un beau succès. Jean Anouilh rencontre Robert Brasillach, écrivain, critique de théâtre, et rédacteur en chef de Je suis partout, un journal d’extrême droite. |
1939 | Jean Anouilh crée avec Jean-Louis Barrault ( l’un de ses amis du Lycée Chaptal) et René Barjavel la revue, La Nouvelle Saison |
1940 | André Barsacq crée au Théâtre de l’Atelier Léocadia avec, dans les rôles principaux, Pierre Fresnay et Yvonne Printemps |
1941 | Pendant l’occupation, Jean Anouilh continue d’écrire. Il ne prend position ni pour la collaboration, ni pour la résistance. Ce non-engagement lui sera reproché. Création d’Eurydice , la première de ses pièces sur les mythes antiques. Création de : Le Rendez-vous de Senlis avecPierre Fresnay |
1942 | Il écrit Antigone |
1944 | Antigone est créé en février par André Barsacq au théâtre de l’Atelier. Cette pièce connaît un grand succès public mais engendre une polémique. Certains reprochent à Anouilh de défendre l’ordre établi en faisant la part belle à Créon , ce qui expliquerait, selon eux, que la pièce n’ait pas été censurée par les allemands. Ses défenseurs indiquent au contraire que l’insoumission d’Antigone qui dit non, et s’engage contre la raison d’état, incarnée par Créon, a une réelle valeur subversive |
1945 | Jean Anouilh s’engage pour essayer de sauver l’écrivain collaborateur Robert Brasillach de la peine de mort; en vain. Cette exécution le marque profondément |
1946 | Roméo et Jeannette. Première pièce d’Anouilh interprétée par Michel Bouquet qui restera fidèle à Anouilh interprétant de nombreuses de ses pièces |
1947 | L’Invitation au château avec Michel Bouquet. |
1948 | Ardèle ou la Marguerite |
1950 | La Répétition ou l’amour puni . Cette pièce sera créée par Jean-Louis Barrault au Théâtre Marigny. |
1951 | Colombe |
1952 | La Valse des toréadors L’alouette |
1953 | Anouilh est un des premiers à saluer le talent de Samuel Beckett, lors de la création d’En attendant Godot |
1955 | Ornifle ou le courant d’air |
1956 | Pauvre Bitos ou le dîner de têtes , pièce dans laquelle Anouilh dénonce violemment les procès de la libération |
1959 | Becket ou l’honneur de Dieu , un drame sur l’amitié et le devoir L’Hurluberlu ou le réactionnaire amoureux La Petite Molière |
1961 | La Grotte. La pièce est un échec, Anouilh se tourne alors vers la mise en scène. |
1968 | Le Boulanger, La Boulangère et le Petit Mitron. |
1969 | Cher Antoine |
1976 | Chers Zoizeaux |
1981 | Le Nombril |
1987 | Mort de Jean Anouilh |
Oeuvres
1932 | L’Hermine |
1933 | Mandarine |
1935 | Y avait un prisonnier |
1937 | le Voyageur sans bagage |
1938 | la Sauvage Le Bal des Voleurs |
1940 | Léocadia |
1941 | Eurydice Le Rendez-vous de Senlis |
1942 | Antigone |
1946 | Roméo et Jeannette |
1947 | L’Invitation au château |
1948 | Ardèle ou la Marguerite |
1950 | La Répétition ou l’amour puni |
1951 | Colombe |
1952 | La Valse des toréadors L’alouette |
1955 | Ornifle ou le courant d’air |
1956 | Pauvre Bitos ou le dîner de têtes |
1959 | Becket ou l’honneur de Dieu L’Hurluberlu ou le réactionnaire amoureux La Petite Molière |
1961 | La Grotte |
1968 | Le Boulanger, La Boulangère et le Petit Mitron. |
1969 | Cher Antoine |
1976 | Chers Zoizeaux |
1981 | Le Nombril |
Liens
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