La petite rapporteuse (salon du livre 2005 à Paris)

Samedi 19 mars, lorsque je me suis dirigée dans la queue pour pénétrer à l’intérieur du salon du livre, 25è édition, j’étais déjà très en retard. Il était presque 15h, alors que j’avais normalement Rv à 13h30. Oui, un rendez-vous inattendu avec une internaute qui m’avait écrit plusieurs fois en réaction à mes articles sur Florian Zeller puis ensuite des tas d’autres sujets.

Sept ans que je travaille dans les nouvelles technologies, j’ai tchatché avec des centaines de personnes, mais il s’agissait là de  ma première rencontre « physique » avec une personne connue via le média Internet. Probablement que le sujet de nos conversations y est pour quelque chose. On dit souvent que la vie sans amour ne vaut rien, mais je rajoute sans hésiter que sans  « passion » ni « enhousiasme », elle ne vaut pas grand chose non plus.

Faire 500 km pour venir rencontrer une personne inconnue (moi) qui n’est pas à l’heure  au rendez-vous fixé , puis se jeter dans la jungle parisienne d’un salon blindé de monde où même certains exposants se paument, il faut en avoir de la passion et de l’enthousiasme pour les livres. Une fois face à face, et après quelques instants de surprise et d’observation, nous nous sommes longuement parlé (toujours l’internaute et moi) , puis à nouveau séparées à ma demande.

Le temps pour  moi de me mettre dans l’ambiance du lieu et de sa démesure de mètres carrés. Puis observer, j’adore observer. Je suis parfaitement inconnue c’est génial et les gens sont naturels au moins.

Et dire qu’en deux semaines, nous sommes passés des poules, vaches, cochons, ânes. aux  livres, studios de radio, micros, thés et samovar russes, frères Poivre d’Arvor, commissaire Navarro,.La porte de Versailles avait aussi eu son lot d’écart de températures !

Comme à l’habitude dans ce genre de grand événement culturel, l’espace est bien sûr  immense, et nous public, on se plaint de ne rien trouver. On a raison, je confirme. Les allées sont encombrées, les halls mal indiqués, puis la chaleur, le bruit et les bousculades font qu’au bout de 5 mn à peine on se demande si on va rester. De plus nos écrivains, ceux qu’on admire, idolâtre, ou qui nous fascinent sont ,en général, venus faire leur travail ; celui de rencontrer leurs lecteurs, leur faire acheter des livres et discuter que dis-je « parloter » quelques secondes avec eux, signer les livres puis c’est tout. Normal, on se plaint, on veut plus.

Un temps mort dans ma ballade lorsqu’une dame d’une soixantaine d’années m’interpelle et demande :

–  Mademoiselle savez-vous où je peux trouver le « Da Vinci Code » ? 

Et moi de regarder tout de suite ma chemise, mon sac, et de constater rapidement que je n’avais ni badge exposant, ni autocollant  mis par un éventuel farceur. Courtoise, je lui répondis :

– « heu.. non ! je ne sais pas  madame mais je suis certaine que vous allez  trouver !»

Franchement je m’attendais à tout sauf à ça. Être encore obligée d’évoquer ce livre qui n’a vraiment pas besoin de publicité supplémentaire, enfin c’était gagné. Bravo Dan. Toutefois je résiste, je n’ai pas lu votre livre ; eh oui trop gros, trop vu, trop lu, trop entendu, trop « trop » !. Je sais l’éditeur s’en fiche que je ne l’ai pas encore lu ,mais bon. ,j’attends le film !

Les grandes maisons d’éditions avaient trouvé le bon filon. Il suffisait de lever la tête au ciel pour distinguer très rapidement les Flammarion, Albin Michel, Hachette, et autres Gallimard. On ne pouvait donc pas les louper, c’était fait exprès, à prix d’or. C’est donc ainsi que,  victime du marketing visuel (et autre chose soyons honnêtes), je me dirigeais vers eux.

Je découvris alors une file incroyable chez Albin Michel pour Eric-Emmanuel Schmitt. Je n’en croyais pas mes yeux. Pour moi cet auteur était plutôt dans la catégorie des auteurs difficiles à lire, et pour lesquels une maturité de lectures était nécessaire.  Niet ! ses derniers livres et pièces de théâtre sont devenus de vrais phénomènes grand public, en France et à l’étranger depuis quelques années déjà.

J’ai lu son « Evangile selon Pilate » que j’ai trouvé vraiment très intéressant. Je l’avais emmené avec moi.  Mais aucune chance de le faire signer. Trop de monde et trop d’attente, pour un auteur plutôt froid et à priori inaccessible.

Puis quelque temps plus tard, je retrouvais mon internaute chez Flammarion, elle échangeait déjà quelques mots avec Florian Zeller.

Je ne savais même pas qu’elle avait acheté son dernier livre. Je me rappelais qu’elle m’avait écrit tout un tas de choses sur lui et ce livre, choses qui ne m’avaient pas fait  hésiter à la rencontrer.

Puis je m’étais dit, jamais elle ne lirait ou achèterait son dernier livre, finalement si. Agréable surprise.  J’étais donc assez fière. Je ne m’étalerais donc pas sur Florian Zeller, je l’ai déjà fait (interview), mais c’est  toujours sympa de le revoir quelques jours d’affilée, et de passer au tutoiement !

Dimanche 20 mars, encore des stars à l’affiche mais file d’attente hallucinante. Je renonçai, trop difficile de résister au superbe soleil ce jour-là.

Mardi 29 mars, c’était la nocturne. A19h pas de queue significative à l’extérieur je rentrais donc  illico. Ne rêvons pas, personne dehors car tout le monde déjà dedans. Cela dit plus de professionnels que de public, je reconnaissais un tas de journalistes TV, radio, ou presse, qui sont toujours  «  hyper super occcuuppés, et qui n’ont pas le temps, . » .

Puis, toujours en observatrice /rapporteuse, je me dirigeais direct vers Albin Michel, stand de l’éditeur que j’avais surnommé  « une star chaque jour ». Et quelle star en ce mardi nocturne. ? Amélie Nothomb.

Alors là, délire total. Il y avait des barres grises comme dans les concerts et les manifestations, une file monstrueuse et je n’ai pas pu résister à demander à quelques  adolescentes présentes :

– «  Depuis  quand êtes-vous là ? » 

– «  Moi 15h30 » dit l’une d’entre elles.   Et elle était encore fraîche la Stéphanie, c’était son prénom, entendu plus tard.  Car il était près de 20h  et toujours pas d’Amélie  Nothomb!

La fan devait avoir moins de 18 ans. Puis je me suis dit pour qui j’avais fait un truc pareil moi  il y a 15 ans ? ah oui c’était pour une rock star dont j’avais les posters dans ma chambre. Mais j’avais jamais fait ça pour un écrivain, c’est clair. A noter que le phénomène groupie s’élargit clairement à autre chose que la musique, le sport ou les acteurs, plutôt bien, non ? surtout si ça fait lire.

Quand Amélie Nothomb arriva (en retard comme une star), je fus agréablement surprise. Elle se laissa prendre en photo en discutant simplement avec ses fans. Mais le plus surprenant c’est qu’elle les connaissait quasiment toutes. Elle les embrassait les appelant par leurs prénoms. Certaines avaient même apporté des cadeaux pour elle. Je restais quelques minutes à les observer toutes, complètement noyée dans la foule qui se pressait dans tous les sens.

Le constat fut rapide : absolument aucune chance de faire signer l’unique bouquin que j’ ai jamais lu d’elle « Stupeurs et tremblements » , à moins de doubler l’une de ces filles fanatiques et donc  me faire égorger en direct, on en était vraiment là, sans exagération aucune.

Ce sera donc pour une prochaine fois, je m’organiserai moi aussi. En plus, pour vous prouver que j’ai vraiment bien observé, je rapporte donc cette ultime info : sachez qu’Amélie signe sans regarder sa feuille ni ce qu’elle écrit.  Elle préfère consacrer les 5 à 10 secondes dont elle dispose à regarder son interlocuteur droit dans les yeux, pas mal non ? moi je dis bravo, c’est plutôt respectueux.

Enfin voilà c’est tout pour cette fois-ci.

En conclusion, sachez juste que  « 165.000 visiteurs ont été recensés pour cette 25è édition du Salon du livre contre 185.000 l’an dernier (soit -10%) ont annoncé les organisateurs un jour avant la fin du salon . La présence de toutes les régions de France a aussi mis en valeur la diversité d’éditeurs souvent méconnus des parisiens  (source AFP, 23 mars 05) ».

Enfin 2004 a été une superbe année pour le milieu éditorial avec une croissance de plus de 4%, selon Serge Eyrolles président du syndicat national de l’édition (SNE).

Par Shadi Biglarzadeh
Consultante stratégie-organisation en nouvelles technologies
28 mars 2005
shb_alalettre@yahoo.fr