Eugène de Rastignac est un personnage de la comédie humaine (1830-1848) d’Honoré de Balzac.
Il figure en particulier dans le Père Goriot (1834), les Illusions perdues (1837-1843) , Etude de femme (1830), la Peau de chagrin (1831) , La Maison Nucingen (1838).
Il est né en 1798, il est le fils ainé de nobles peu fortunés, vivant des revenus de la vigne, à Ruffec, près d’Angoulême, il a deux sœurs.
Le Rastignac de la pension Vauquer est sans doute la plus vivante, la plus sympathique figure de jeune homme qu’ait dessiné Balzac.
Qui ne ferait confiance à cet étudiant de bonne famille, digne dans sa pauvreté, intelligent idéaliste, impétueux, dévoré d’appétits de gloire et de puissance qu’il ne songe à satisfaire qu’à force de travail ?
Rastignac est venu à Paris faire des études de droit. Dans leur lointaine province, ses sœurs se privent de tout pour lui permettre d’occuper un jour dans le monde une place digne de ses origines. Paris est là, avec son luxe et ses femmes, avec le scintillement de ses convoitises et avec ses tentations de facilité.
Rastignac est un jeune homme ambitieux, qui regarde la « bonne société » avec des yeux à la fois surpris et envieux et qui va se montrer prêt à tout, pour parvenir à ses fins. Élégant, bien éduqué, brun aux yeux bleus, il fait chavirer les femmes du monde, ce qui va faciliter son ascension sociale.
C’est l’une des plus grandes dames de Paris, Mme de Beauséant, qui révèle au jeune homme le secret des réussites rapides et grandioses : calculer froidement, cacher tout sentiment vrai, se pousser sans pitié… Devant un tel programme, la conscience de Rastignac se révolte. A la tentation du succès mondain s’oppose la tentation de la pureté.
Cependant, introduit dans l’entourage des Nucingen, Rastignac voit la corruption, le cynisme, la férocité qui se donnent libre cours sous le vernis de la société. Il s’indigne encore, mais de plus en plus faiblement. Trop franches, les propositions d’un Vautrin le hérissent, mais peu à peu il se laisse glisser, ruse avec sa conscience, laisse se dissoudre sa foi dans l’idéal. La mort atroce du père Goriot victime de l’ingratitude de ses filles, marque le terme de cette évolution. Rastignac voit désormais le monde tel qu’il est, tissé de crimes impunis, indifférent au travail et à l’honnêteté, impitoyable pour tous ceux qui refusent de se soumettre à sa loi, celle de la jungle.
Eugène de Rastignac & Vautrin
Des hauteurs du Père-Lachaise, où il vient de suivre le convoi de Goriot, Rastignac jette son défi à la société. La vie est une proie qu’il faut posséder par tous les moyens et sans aucun scrupule.
Il est, avec Vautrin et Lucien de Rubempré l’un des principaux personnages récurrents de Comédie humaine
Adolphe Thiers, aurait servi de modèle à Balzac. Il a d’ailleurs rédigé un sévère portrait de ce « loup politique » dans la Chronique de Paris du 12 mai 1836 : « M. Thiers a toujours voulu la même chose, il n’a jamais eu qu’une seule pensée, un seul système, un seul but […] : il a toujours songé à M. Thiers. »
Comme Thiers, Eugène de Rastignac épouse la fille de sa maîtresse. Comme lui, il est cynique, passé maître en duperies et en luttes d’influence.
Aujourd’hui, « Rastignac » est devenu un terme générique qui désigne un arriviste, un « jeune loup aux dents longues ».
Source bibliographique
Dictionnaire des Personnages de Laffont-Bompiani (Editions Robert Laffont)
Dictionnaire des Grandes Oeuvres de la Littérature française, Jean-Pierre de Beaumarchais, Daniel Couty (Editions larousse)
Kléber Haedens Une Histoire de la Littérature française, Grasset 1970