Combat de nègre et de chiens de Bernard-Marie Koltès

Combat de nègre et de chiens est une pièce de théâtre que Bernard-Marie Koltès a écrite en 1979. Elle a été publiée aux éditions Stock en 1980 et créée au Théâtre La Mama à New York en décembre 1982 dans une mise en scène de Françoise Kourilsky.

Patrice Chéreau la met en scène au Théâtre des Amandiers de Nanterre en février 1983 avec Michel Piccoli, Philippe Léotard, Sidiki Bakaba, et Myriam Boyer dans des décors de Richard Peduzzi.

La pièce sera ensuite jouée au TNP Villeurbanne, en mai 1983 dans le grand hangar désaffecté de l’aéroport de Lyon-Bron.

Bernard-Marie Koltès (1948-1989) dans l'émission "Apostrophes

Bernard-Marie Koltès (1948-1989) sur le plateau d’Apostrophes

Résumé de la pièce

Dans un pays d’Afrique de l’Ouest, un chantier de travaux publics est sur le point de fermer. Ne restent plus que le chef de chantier de soixante ans, Horn, et un ingénieur d’une trentaine d’années, Cal. 

L’arrivée simultanée d’Alboury, un homme noir, venu réclamer le corps de son frère, victime d’un accident du travail, et de Léone, une jeune femme que Horn a fait venir de Paris pour l’épouser va catalyser la violence latente de la situation.

En réalité le frère d’Alboury a été non pas accidenté mais tué par Cal qui surgit soudain, racontant comment il a tué le noir qui l’avait offensé, et tenté plusieurs solutions pour se débarrasser du corps avant de le jeter aux égouts.

Cal tente en vain de séduire Léone mais c’est Alboury qui attire la jeune femme…

Sur fond de suspense, où l’amour joue un rôle de premier plan, se déploie une fiction dans laquelle Koltès confronte deux regards sur le monde, la vie, la mort. D’un côté Alboury, viscéralement et spirituellement relié à sa terre natale. De l’autre des étrangers, mus par le matérialisme. 

Cette pièce s’inspire de l’expérience de Koltès au Nigéria dans les années 70 où suintaient encore les relents coloniaux, le racisme et le capitalisme prédateur. Dans ce huis clos de la vengeance où se fracassent les destinées de quatre êtres solitaires qui manient la langue poétique et viscérale de Koltès. « Une pièce thriller tout autant qu’une chronique des fêlures humaines ».


Koltès parle de Combat de nègre et de chiens

 « Combat de nègre et de chiens ne parle pas, en tout cas, de l’Afrique et des Noirs – je ne suis pas un auteur africain -, elle ne raconte ni le néocolonialisme ni la question raciale. Elle n’émet certainement aucun avis. Elle parle simplement d’un lieu du monde. On rencontre parfois des lieux qui sont des sortes de métaphores, de la vie ou d’un aspect de la vie, ou de quelque chose qui me paraît grave et évident, comme chez Conrad par exemple les rivières qui remontent dans la jungle… J’avais été pendant un mois en Afrique [en 1978] sur un chantier de travaux publics, voir des amis. Imaginez, en pleine brousse, une petite cité de cinq, six maisons, entourée de barbelés, avec des miradors ; et, à l’intérieur, une dizaine de blancs qui vivent, plus ou moins terrorisés par l’extérieur, avec des gardiens noirs, armés, tout autour. C’était peu de temps après la guerre du Biafra, et des bandes de pillards sillonnaient la région. Les gardes, la nuit, pour ne pas s’endormir, s’appelaient avec des bruits bizarres qu’ils faisaient avec la gorge… Et ça tournait tout le temps. C’est ça qui m’avait décidé à écrire cette pièce, le cri des gardes. Et à l’intérieur de ce cercle se déroulaient des drames petits-bourgeois comme il pourrait s’en dérouler dans le XIVème arrondissement : le chef de chantier qui couchait avec la femme du contremaître, des choses comme ça… Ma pièce parle peut-être un peu de la France et des Blancs : une chose vue de loin, déplacée, devient parfois plus déchiffrable. Elle parle surtout de trois êtres humains isolés dans un lieu du monde qui leur est étranger, entourés de gardiens énigmatiques. J’ai cru – et je crois encore – que raconter le cri de ces gardes entendu au fond de l’Afrique, le territoire d’inquiétude et de solitude qu’il délimite, c’était un sujet qui avait son importance ».

Bernard-Marie Koltès

Source bibliographique

En savoir plus :