Colette Rey & Catherine Bottiau sont deux sœurs jumelles dont l’une vit aujourd’hui grâce au don de l’autre.
Issues d’une fratrie de sept enfants, Colette et Catherine ont toutes les deux 63 ans, – gémellité oblige – en 2014 au début de leur récit.
Cette année-là, Colette Rey apprend qu’elle a un cancer de la moelle osseuse qui détruit ses deux reins. Sa sœur est à ses côtés pour les opérations, les dialyses et les chimiothérapies.
Les deux sœurs étant 100% compatibles, Catherine décide de faire don de sa moelle osseuse à Colette en 2019, puis deux ans plus tard, de donner un rein.
En juin 2021, la greffe est réalisée, une libération pour les deux sœurs et leurs familles respectives.
Toutes les deux à la retraite, elles continuent néanmoins à exercer, l’une dans le domaine des salons professionnels, l’autre dans l’univers passionnant de l’expertise en écriture pour le compte de la Cour d’appel de Versailles.
Elles ont publié en Juin 2024 « Deux reines pour un rein », une incroyable histoire de dons !
Colette Rey & Catherine Bottiau
Interview de Colette et Catherine
– Colette, comment avez-vous appris que vous aviez une insuffisance rénale et qu’est-ce qui vous a incitée à en faire le récit avec votre sœur jumelle ?
En septembre 2014, suite à une grosse fatigue, j’ai été hospitalisée en urgence et c’est là on m’a détecté une insuffisance rénale sévère, problème dû à la présence d’un myélome, ou cancer de la moelle osseuse. Ma sœur jumelle s’est immédiatement déclarée « personne de confiance » et a commencé à communiquer avec toute notre famille (très nombreuse) pour donner des nouvelles régulièrement.
C’est elle qui a initié l’idée d’écrire cette histoire.
– Catherine, vous avez immédiatement décidé d’aider votre sœur et de faire office de « référente ».
Pourquoi ? A quel moment avez-vous pensé à écrire un livre ?
Soutenir ma sœur s’est directement imposé à moi, et je me suis positionnée comme étant la seule interlocutrice pour les contacts avec les médecins, la famille, les amis. J’ai commencé à communiquer par mail sur tous les évènements, les infos, concernant l’état de Coco pendant toutes ces années. Quand je lui ai montré tous ces échanges, au bout de plusieurs années, on s’est dit : « Il y aurait de quoi écrire un livre !! »
Et c’est ce qu’on a fait !
– Catherine, quand avez-vous compris que vous pourriez donner un rein à votre sœur ?
Dès que j’ai entendu « dialyse à vie », j’ai pensé au don de rein.
Pour la moelle, le protocole était d’abord une autogreffe mais déjà, je demandais à donner ma moelle, pour une 2ème greffe « syngénique ». La priorité des médecins étant le traitement du myélome, la greffe de rein n’était pas d’actualité. Et d’ailleurs, ils n’avaient pas réalisé la chance incroyable d’avoir une sœur jumelle monozygote parfaitement identique ! Donner mon rein était une évidence pour moi … et pour ma sœur, à tel point qu’on n’en avait jamais vraiment parlé ensemble.
– Colette, comment avez-vous réagi à l’idée de recevoir un rein de votre sœur ? Étiez-vous inquiète, angoissée ?
Nous avons toutes les deux appréhendé la greffe de moelle puis du rein, comme les étapes d’un parcours qu’on s’était tracé. Je savais que Cachou en avait parlé à ses enfants, à mes enfants aussi avec qui elle avait une relation très étroite, et qu’elle considérait que ce rein était déjà le mien ! Ce qui ne m’a pas empêchée de me poser mille questions, avec le sentiment quand même qu’elle était aussi désireuse de me donner ce rein que moi, de le recevoir.
Les angoisses, le stress qu’on a vécus toutes les deux pendant ces années étaient dus plutôt au fait que ça ne puisse pas se faire, pour des raisons médicales (le myélome !). D’ailleurs, la faculté était moyennement optimiste sur la réalisation de ce projet !
– Plus de 3 années après cette greffe de rein, et l’écriture de cette histoire particulière, comment se déroule pour vous deux, le quotidien, la vie en général ?
Colette : Reprendre le cours de ma vie n’a pas été si facile, en fait : retrouver son autonomie, réorganiser son temps, se resocialiser … ça ne se fait pas en claquant des doigts, mais ça se fait, il faut juste ne pas être trop pressée !!
Garder le contact avec tous les soignants, médecins et autres qui m’ont suivie pendant toutes ces années a été essentiel pour moi, presque un besoin !
Et puis, avec ce livre, nous avons voulu partager cette expérience, raconter ce monde médical et son environnement si singulier, ses acteurs aussi, avec l’optimisme et l’humour qui sont un peu l’ADN de notre nombreuse famille !
… Ce qui nous a poussées, au finish, à nous investir et œuvrer pour « prêcher » la bonne parole en matière de prévention, de dialyse, de don d’organe, d’information et de conseils, en collaboration avec les associations concernées.
Un juste retour des choses, finalement !
Catherine : Énorme soulagement d’avoir enfin réussi, et le bonheur indescriptible de voir ma sœur « libérée, délivrée » ! Aujourd’hui, je « milite » pour le don de rein d’un vivant, il y a énormément à dire et à faire en la matière…
– Quels messages souhaitez vous partager aujourd’hui avec ceux qui sont en attente d’une greffe ou leurs proches ?
Colette : Chaque cas est unique et le nôtre encore plus ! Le myélome, les reins, 7 années de dialyse, une sœur jumelle 100% identique, le double don souches + rein, cette famille incroyable et bien sûr, des équipes médicales fantastiques, présentes, compétentes, totalement concernées …
Et même si le système médical en France est quelque peu sinistré, j’ai bénéficié des meilleurs traitements, des meilleurs spécialistes et c’est à eux que je pense aujourd’hui : mon myélome est en rémission depuis 5 ans, mon 3ème rein fait le job sans problème (et sans médicaments anti-rejet !) et surtout, ma sœur Cachou va parfaitement bien !
Notre message : Vivre, se faire plaisir, communiquer avec ses proches, anticiper aussi les problèmes en se faisant régulièrement détecter, et surtout, ne jamais oublier que pour un donneur vivant, donner un organe est aussi important que pour le receveur, de l’accepter !
Deux reines pour un rein – Une incroyable histoire de dons de Colette Rey & Catherine Bottiau
Publié le 12 juin 2024
Editions Vérone