Introduction
Né à Paris en 1888, Georges Bernanos fait des études de droit et de lettres. Catholique et royaliste, il milite auprès des « Camelots du Roi ». Ses premiers essais romanesques paraissent dans la presse en 1913 et 1914 avant d‘être réunis dans un livre intitulé Dialogues d‘ombres. Bien que réformé en 1911, il parvient cependant à s’engager fin août 1914. Sa passion des chevaux et de l’équitation le conduit à choisir la cavalerie. Il rejoint fin décembre le 6e régiment de dragons dans lequel il servira jusqu’à l’armistice.
Comme celle de bien d’autres écrivains, œuvre de Georges Bernanos est marquée par la Grande Guerre. À travers son travail d‘écriture, il ne cessera de sonder le mystère du mal tout en s’engageant dans un combat pour la foi et la liberté.
La guerre est le creuset de son œuvre. Il écrit dans une lettre : « Ceux qui n’entendent pas ce que ce temps a de tragique, non pas à cause des quelques milliers de morts, mais parce qu’il marque une limite dans l’histoire du monde, sont des ânes. »
« L’épreuve des tranchées lui a révélé la redoutable grimace de l’humanité moderne », a observé Albert Béguin, professeur de littérature, critique d’art et éditeur, que Bernanos a chargé de s‘occuper de ses écrits après sa mort. C’est là sans doute que prend naissance la dimension tragique de son œuvre, l’auteur passant, comme le souligne Jean Bastier « d‘un univers un peu conventionnel à des ciels bas et troubles, des aubes sales et livides, des terres boueuses et sataniques », qui peupleront ses grands romans. De son livre Sous le soleil de Satan, commencé peu après l’armistice et paru en 1926, Bernanos lui-même dira qu’il est né de la guerre.
En février 1915, Bernanos est dans la Marne, en avril, près de Verdun. En mai, sa division se trouve en Picardie où une partie des hommes sont terrés dans les tranchées. En septembre, avant les deux grandes offensives en Artois et en Champagne, il espère une percée de l’infanterie qui permettra enfin à la cavalerie de chevaucher victorieusement. Mais la grande attaque est annulée. Durant l’hiver qui suit, le 6e dragons fournit encore des détachements aux tranchées. Lors d’un bombardement, le 1er mai 1916, Bernanos est sérieusement commotionné : « Leurs gros obus nous encadraient bien régulièrement, en rétrécissant le cercle de minute en minute, jusqu‘au moment où l’un d’eux éclatait dans la tranchée même, à la hauteur d’une tête et à un mètre de moi. Quel éclair (…) et tout de suite après, quel noir! La chose étincelante m‘avait jeté je ne sais où, avec un camarade, sous une avalanche de terre fumante. Le sol autour de nous et au-dessous de nous était criblé d’éclats énormes (…) ».
En février et mars 1917, il suit des cours de pilotage à l’école d’aviation de Dijon-Longvic, puis à celle de Chartres. Mais, sa vue n’étant pas jugée suffisamment bonne, il est renvoyé début avril au 6e dragons. Il profite cependant de son éloignement momentané du front pour se marier le 14 mai 1917.
Arrivent les grandes offensives allemandes du printemps 1918. L‘unité de Bernanos se bat, à pied, dans l’Aisne, l’Oise. Le 30 mai, il est blessé à la jambe et reçoit une citation. « J’ai fait deux jours de service de liaison entre ma section et ma compagnie. (…). J‘ai circulé toute la journée de jeudi dans une plaine et un bois littéralement criblé de balles (….). J’ai combattu comme je l‘avais toujours rêvé. »
Hospitalisé en juillet-août, Bernanos rejoint en septembre son régiment : « Poussière, boue (…), je reprends la couleur de nos chemins ». Quand arrive le 11 novembre, l’écrivain partage le regret des cavaliers : il n’y a pas eu de victoire complète, pas de poursuite avec désorganisation de l’armée ennemie. Il sera également déçu par l’application du traité de Versailles : « La Victoire ne nous aimait pas », écrira-t-il dans Les Enfants humiliés.
Dans les années trente, il rompt avec son milieu politique. Installé avec sa famille à Palma de Majorque, il assiste de là à la guerre d’Espagne qui lui inspirera Les grands cimetières sous la lune (1938), où il stigmatise Franco et ses partisans. En 1938, il part pour le Paraguay, puis le Brésil. Qualifiant le régime de Vichy de « ridicule dictature agricole », il prend le parti du général de Gaulle.
Il rentre en France en 1945, repart pour la Tunisie d‘où il ne reviendra que pour mourir, à Neuilly, en 1948.
Source bibliographique : Jean Bastier, « Georges Bernanos, le dragon de 1914-1918 » & cheminsdememoire.gouv.fr
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